Un moment de nostalgie [terminée]

Un an... Je n'imaginais pas que le temps pouvait passer aussi rapidement et me voilà en train de marcher dans une petite ruelle balayée de sa neige... Fumant de ma kiseru (pipe), j'observais les différents bâtiments recouverts de cette épaisse couche blanche et froide... Jamais, au plus grand jamais, je n'aurais vu ses bâtisses remis à neuf sans l'aide de mes amis... Onze ans auparavant, ce n'était qu'un tas fumant de débris et de ruines... Et "nous" étions que de simples mioches à peine matures... Par quel miracle a-t-on pu reconstruire ce village réduit en cendres dans notre état de choc? Cette question, je me la posais depuis ce temps mais aucune réponse ne m'est venue... Peut-être la trouverai-je à l'avenir?

Mon chat, Kuma, trottinait tranquillement à mes côtés, contrastant de sa couleur noire sur la surface blanche neigeuse. Mon regard se porta de droite à gauche, toujours fixé sur les petits détails sans importance. De la fumée sortait de quelques chaumières, signifiant un petit combat contre le froid et le verglas.

Moi-même, je combattais ce froid vêtu d'un kimono noir avec pour motifs des grues blanches dans un paysage évoquant la mer. Par-dessus, j'avais mis un autre vêtement plus court mais à longues manches et beaucoup plus épais. Pour finaliser, une écharpe de laine blanche tricoté par ma meilleure amie est enroulée autour de mon cou. Même si mon Démon, Akuryô, a la forme d'une panthère des neige, cela ne me garantit pas une protection contre ce froid mordant. Parfois, je l'envie.
Je levai la tête pour apercevoir le ciel grisé de nuages d'où s'échappaient les minuscules boules de neige, aussi légères que des plumes. Dans un mois, le printemps reviendra, apportant ses notes de couleurs chatoyantes. Pourtant, ce n'est pas ma saison préférée...

Sortant lentement de mes pensées, mes pas m'avaient conduit vers l'entrée du village sans que j'en prenne conscience. Au loin, je sentis une présence... Humaine... Mes yeux bleus clairs m'indiquèrent une silhouette noire près de la berge.

Il était très tôt ce matin-là, mais Ansatsu était déjà dehors. Alors que le reste du village commençait à s'éveiller, lui rentrait bredouille d'une traque qui avait duré toute la nuit. Il avait tenté de trouver le sommeil dans la Tanière, coulé dans les épaisses couvertures de son lit, près de l'âtre. Mais n'étant pas parvenu à s'endormir, il s'en était retourner vers l'entrée du village, et s'était assis près du cours d'eau qui le bordait. Son regard se perdait dans les flots qui défilaient devant lui, alors qu'il s'asseyait à côté. Une pensée qui n'était pas la sienne traversait son esprit, celle de Bastardo. Il s'y était habitué.

Bastardo était vraiment désolant. Lui qui méprisait la race humaine n'était rien d'autre qu'un démon violent et bestial. Comble du comble, il s'était lâchement réfugié dans le corps d'Ansatsu après sa mort. Il se releva, essuyant la poudreuse qui s'était lentement accumulée sur son manteau. Il hésitait entre retourner chasser, réessayer de dormir ou encore trouver u bois pour la cheminée. Aucune de ces trois options ne le rendait enthousiaste à ce moment précis, mais il finirait par tomber malade s'il s'éternisait ici.
C'est alors qu'il entendit la neige craquer derrière lui. Un bruit de pas de quelqu'un qui venait du village.


Il se retourna lentement pour faire face au villageois, sans savoir si ce mouvement était le fruit de sa curiosité, ou de la méfiance du Démon.


Ansatsu prit un air amical, et secoua légèrement la tête pour enlever la neige dans ses cheveux. C'était joli la neige dans un sens, et pratique pour pister un Démon, mais c'était froid quand même.

- Bonjour, Shinryû-kun. Belle matinée n'est ce pas ?

La journée s'annonçait bien malgré son heure peu avancée. Il n'était encore que très tôt mais j'étais plutôt satisfaite, la chasse n'avait pas été mauvaise, comme d'habitude.
Il n'y avait pas à dire, même si le caméléon qui me servait de démon était souvent une véritable source d'ennuis, surtout niveau nourriture, il y avait aussi du bon. Avec lui, je ne rentrais jamais bredouille de la chasse, l'avantage de pouvoir se fondre dans le paysage grâce à Shuryou. Je lui jetais un regard de biais en empruntant le sentier, la taille de ce caméléon me laissait toujours pantoise, et mon adorable renard de compagnie paraissait pour un avorton à côté de ce lézard. Tout cela était très logique...
Je reportais mon attention sur la route enneigée et retournais en sifflotant vers le village tout en me demandant à qui j'aurais bien pu vendre mon gibier à un bon prix. Les gens avaient tendances à devenir radins ces derniers temps... enfin, avec un peu de chance et beaucoup négociations, je finirais bien par arriver à une somme raisonnable.
Ça me mettait d'encore meilleure humeur tiens !
Je me demandais ce que j'allais faire ensuite. La chasse m'avait fatiguée, je n'avais pas fermé l'œil de la nuit et le manque de sommeil commençait à se faire ressentir dans mes membres courbatus et engourdis par le froid, je me demandais de quoi je pouvais bien avoir l'air. Bah il devait bien y avoir pire, mes cheveux étaient en bataille et mon kimono quelques gouttelettes de sang, mais ça allait encore pour une fois, après tout les gens avaient l’habitude me voir arriver avec mes carcasses sur le dos, alors je ne m’en faisais pas trop. Mais là n'était pas la question, ce qui comptait le plus pour l'instant c'était le fait que je devais trouver un acheteur avant d'aller me coucher. Quoi que... J'aurais sans doute dû aller dormir, ça serait la meilleure chose à faire, mais j'avais une soudaine envie de m'entrainer à l'arc. Après tout, je n'en avais jamais vraiment l'occasion juste pour mon plaisir.
Peut-être qu'après m'être débarrassée du gibier je pourrais aller m'entrainer... Grandiose idée ! J'allais faire ça !
Je continuais donc mon chemin en direction du village tout en souriant, lorsque j'aperçus deux silhouettes à l'entrée du village. Plus j’avançais, plus je les distinguais nettement et bientôt je me rendis compte qu’il s’agissait Kotchisura Shinryû et d’un villageois, un certain Ansatsu quelque chose, si mes souvenirs étaient bons. Je fronçais les sourcils, il y avait peut-être un problème au village ?
Je m’arrêtais un instant, songeuse, puis m’avançais en direction des deux hommes. Lorsque je parviens à leur hauteur, je me détendis un peu en pensant que leurs visages n’avaient pas l’air trop inquiets, ce n’était pas des visages soucieux.
Je m’approchais d’eux en souriant.

-Bonjour messieurs. Comment allez-vous ?

Arrivé jusqu'à l'emplacement de la silhouette, je m'aperçus que ce n'était que Ansatsu, un jeune homme qui était venu il y a peu sur l'île et qui semblerait être revenu d'une chasse, mais bredouille. J'eus une impression d'avoir entendu son Démon parler grâce à mon pouvoir mais sachant le franc-parler de cette créature, je préféra l'ignorer.

Fixant Ansatsu d'un air calme, je lui répondis : "Bonjour, Ansatsu. Oui, une très belle matinée malgré les intempéries." Remarquant qu'il m'avait interpellé par mon nom de famille bien qu'il ait associé au 'kun', comme signe de familiarité, j'ajoutai en soupirant : "Appelles-moi par mon prénom, 'Kotchisura'." en faisant apparaître un nuage de brume de ma bouche, dû au froid extrême. Je sais bien qu'il est plus âgé que moi mais bon... Je m'étais rapproché d'Ansatsu mais laissai une distance d'au-moins deux mètres entre nous. Mon Démon, Akuryô, n'aimait pas du tout voire haït les humains, donc j'aimerai ne pas sauter au cou du jeune homme aux cheveux gris. Mais chose étonnante de la part de ce Démon à la forme de panthère des neiges, il n'apprécie pas pour autant le Démon qui hante le corps d'Ansatsu, car cas surprenant, Akuryô a un esprit très 'noble'. Ce que je veux dire par là, c'est qu'il ne tue pas sans raison et jamais pour le plaisir. Bien sûr, tuer des humains est sa seule préoccupation mais heureusement, pour le moment, mon esprit surpasse le sien, ce qui me permet de le maîtriser. Selon mon hypothèse, à cause du caractère sanguinaire et complètement sadique de Basta... Bastardo, si ma mémoire est bonne... Bref, la personnalité du Démon d'Ansatsu est comme qui dirait incompatible avec la sienne. Lors l'un des rares moments où il me parlait, Akuryô m'avait confié que le caractère 'déjanté', oui, il avait bien dit cela, n'est qu'une de ses souillures que l'on voit souvent dans le monde des Démons. Grâce à cet instant, j'ai pu cerner un peu plus cette panthère aux premiers abords très froide.

Mes yeux se levèrent vers ceux de Ansatsu, puis j'aperçus des petites cernes. "Tu m'as l'air fatigué... Serait-tu revenu d'une chasse?"

Un instant après, je sentis une autre présence. Avant que je tourne la tête vers sa provenance, la boule de poils qu'était Kuma se précipita dans la direction de la présence. Humaine, elle aussi. Puis, quelques minutes, je vis Yumiko accompagné de deux autres formes. La première était un petit renard, certes plus grand que mon chat mais pas aussi haut que le gigantesque caméléon qui les accompagnait. Cela devait être son Démon, à Yumiko. Elle nous salua, les cheveux en bataille et les vêtements déchirés, portant sa proie morte sur ses frêles épaules.

"Bonjour Yumiko. La chasse a été bonne, à ce que je vois." en montrant du doigt le gibier.

- Appelles-moi par mon prénom, 'Kotchisura'.

Quelle boulette ! Ansatsu avait toujours cru que le chef du village se nommait Shinryû. Il faut croire qu'il se tenait un peu trop à l'écart des affaires du village. Même si en y repensant, il ne connaissait Kotchisura que de nom.

- Tu m'as l'air fatigué... Serait-tu revenu d'une chasse ? Remarquait le jeune homme en regardant les petites poches qu'Ansatsu avait sous les yeux.


Le chasseur de prime souriait et se frottait l'arrière de la tête en répondant à la question de Kotchisura :

- Oui, ma dernière cible était plus facile à pister de nuit. Mais je rentre bredouille, son... cadavre m'a échappé après sa mort.

Un individu approchait les deux hommes. Plutôt une individu, car il s'agissait d'une demoiselle de petite taille, accompagnée d'un petit renard et d'un grand lézard bipède doté d'yeux globuleux. A en juger par le carcasse animale qu'elle avait sur le dos, c'était une chasseresse. Plus elle s'approchait, plus Ansatsu sentait ses oreilles chauffer. Il était déjà mal à l'aise à commencer une conversation, sa timidité allait prendre le dessus avec un deuxième interlocuteur.

"Tu me fais pitié avec ta timidité... Je vais avoir la nausée !"

Kotchisura saluait Yumiko.

- Bonjour Yumiko. La chasse a été bonne, à ce que je vois.
- Hé, on dirait que la chance sourit à certains aujourd'hui !

Il eut un petit sursaut et secoua la tête de gauche à droite, projetant un peu de neige qu'il avait sur la tête :

- Désolé, c'était impoli, mon Démon a décidé de me mettre en rogne aujourd'hui. On dirait que tu as fait une bonne prise, tu devrais en tirer un bon prix !


- Ferme la ! Dit le garçon tout haut en se donnant une tape sur le front. Il réalisa alors que Kotchisura et Yumiko le regardaient étrangement.


- Je...Euh... Excusez moi !

- Bonjour Yumiko. La chasse a été bonne, à ce que je vois.
- Hé, on dirait que la chance sourit à certains aujourd'hui !

Visiblement certains n’avaient pas eu ma chance, me dis-je en observant Ansatsu qui semblait avoir l’air plutôt dépité, à moins que ça ne soit de la fatigue ? Je souris de toutes mes dents, plutôt contente.

-Oui, en effet, en tout cas ça aurait pu être nettement pire.

-Désolé, c'était impoli, mon Démon a décidé de me mettre en rogne aujourd'hui. On dirait que tu as fait une bonne prise, tu devrais en tirer un bon prix !

Je lâchais un léger rire avant de me reprendre et de sourire de nouveau.
Ah ça, je pouvais aisément le comprendre, dans le genre "je passe mon temps à vous pourrir la vie", on trouvait difficilement plus horrible qu’un démon. Rien que leur manière d’être m’horripile au plus au point, alors rester vingt-quatre heure sur vingt-heure, tous les jours, sans une minute de répit, ensembles, ça relève plus d’une torture que d’une bénédiction.

-Je l’espère aussi !

- Ferme la !

Je me mis à le fixer, choquée, en me demandant s’il n’avait pas un peu trop forcé sur la bouteille ou d’autres choses dans le genre… Depuis quand on me disait ferme-la quand je n’avais encore rien fait ?! Quel toupet il avait ce jeune homme ! J’en étais presque indignée quand je me rendis compte qu’il ne me parlait probablement pas en fait… Ce qui ne résolvait pas la question… Entre un type qui m’insulte et un autre qui parle seul, je me demande qui est le plus à plaindre. Dans le premier cas, il risque de passer un sale quart d'heure, dans l'autre, de passer pour un fou.

- Je...Euh... Excusez moi !

Je le regardais toujours avec insistance en me demandant ce qui ne tournait pas rond chez lui. Je sortis un sourire gêné en détournant le regard, par peur d’avoir l’air trop idiote ou impolie à force de le dévisager.
En tout cas… il était très doué pour laisser de grands blancs dans la conversation, je ne savais plus où me mettre. Le silence s'épaississait de minute en minute, devenant à chaque fois un peu plus insoutenable. Non pas que je n'aimais pas le calme, au contraire, j'adorai ça, mais dans un cas comme celui-ci, c'était plutôt un sentiment de malaise qui m'habitait. C'était à savoir qui briserait en premier cette atmosphère presque irrespirable. Au bout d'un moment, je pris la parole.

-Hum ! Ce n’est pas grave ! Il n'y a pas de mal. Je suppose que la nuit a été trop longue.

Je ne pus me retenir de lâcher un petit rire, de la part de Akuryô, ce dernier étant quelque peu amusé par la situation. Même si le Démon d'Ansatsu lui fait horreur, il ne peut s'empêcher de voir avec amusement des humains se débattre avec leurs propres créatures, surtout celles qui ne s'entendent pas particulièrement avec leurs détenteurs.

*Franchement, Akuryô, je ne vois pas ce qu'il y a de drôle...* pensais-je de toute mes forces afin que je puisse bien me faire entendre. *Tu ne peux me comprendre, Cheveux roux...* me répondit-il, toujours par la pensée, avec son ton mystérieux. Je soupirai, par dépit et revint à la réalité.

"Fermes-la!"

Ca, je ne pensais pas qu'il allait venir alors que je sortais de ma petite transe. Je fixai Ansatsu, l'air un peu hébété mais je me remis bien vite de mon état. L'âme de Yumiko parut troublée, puis je me tourna vers elle et vis son expression pour la plus probable choquée. Elle n'a pas dû comprendre sur le coup que c'était Bastardo qu'Ansatsu insultait et non elle. Mais elle semble avoir compris par la suite. Un long silence suivit notre 'conversation' jusque que Yumiko le brisa.

"Ton Démon fait vraiment des siennes aujourd'hui, non?" lui demandai-je en guise d'explication explicite, sachant par expérience les différentes réactions que j'ai pu voir de chacun de ceux qui sont possédés. Même moi, j'aurai pu réagir de manière violente. Tirant une bouffée de fumée de ma kiseru, je les regardai tous les deux simultanément puis leur proposai : "Et si on t'accompagnait pour vendre cette prise, qu'en dis-tu, Yumiko?" avec un sourire. "Nous n'allons pas rester dans la neige à nous fixer dans le blanc des yeux. Autant profiter que l'on soit le matin pour nous occuper de nos petites affaires et nous amuser après." Déjà que les esprits ne sont pas venus me déranger la nuit dernière, ce qui est rare, cela me rend un peu plus joyeux. "Nous pouvons aller au marché vendre ton gibier et ensuite, hem..."

"Peut-être aller quelque part où nous pouvons nous réchauffer comme le onsen."

Et voilà, pour une fois qu'Ansatsu conversait, il passait pour un grand malade. Décidément, la matinée commençait assez mal. Bien que Kotchisura semblait avoir compris, Yumiko semblait un peu vexée... Elle lâcha tout de même, après un éternel silence de quelques secondes :


-Hum ! Ce n’est pas grave ! Il n'y a pas de mal. Je suppose que la nuit a été trop longue.
- Ton Démon fait vraiment des siennes aujourd'hui, non ?

Ansatsu acquiesçait de la tête, sans mot dire. De toute façon, que fallait-il répondre ? C'était quand même plus une remarque qu'une simple question.

" Sans moi tu n'es rien ! "

" Humain idiot... "

La voix de Kotchisura le ramena à la réalité. Il lança après avoir expiré la fumée de sa kiseru :

- Et si on t'accompagnait pour vendre cette prise, qu'en dis-tu, Yumiko ? Nous n'allons pas rester dans la neige à nous fixer dans le blanc des yeux. Autant profiter que l'on soit le matin pour nous occuper de nos petites affaires et nous amuser après.

Il attendait une réaction, il n'y en eut qu'une :

"Tue les ! "

" Non ! "

La pensée du Démon avait été tellement intense que le jeune chasseur de primes n'avait pas pu retenir un petit mouvement. Une pensée basique et répétitive, mais une volonté de fer. Mais il en fallait plus pour ébranler l'esprit d'Ansatsu.

- Nous pouvons aller au marché vendre ton gibier et ensuite, hem... Peut-être aller quelque part où nous pouvons nous réchauffer comme le onsen.

Le rouge monta aux joues d'Ansatsu, à l'idée d'entrer dans le onsen en compagnie de Yumiko. Plus troublant encore, les yeux globuleux de son lézard qui regardait dans deux directions différentes. C'était vraiment un Démon, ce truc ? Ansatsu s'éclaircit la gorge et gratta la neige avec le pied, baissant la tête pour que personne ne voie son visage tout rouge. Une fois calmé, il releva la tête et répondit aimablement:

- Aucun soucis, je veux bien vous accompagner au marché ! Il regarda dans sa poche: 80 pièces d'or. Le reste était resté à la Tanière. J'en profiterai pour m'acheter le dîner de ce soir. Mais personnellement, je préférerai un bon chocolat chaud près d'un doux feu de cheminée...

" Bien joué l'évitement, mais tu comptes rester chaste toute ta vie ? "

" Les démons... Répugnants... "

Il s'approcha de Yumiko et lui fit un signe de tête:

- Désolé pour mon comportement. Nous y allons ?

Il avait un sourire chaleureux, et des yeux qui montraient sa sincérité. Pas de sadisme ni d'agressivité, il montrait encore sa différence avec Bastardo.

- Et si on t'accompagnait pour vendre cette prise, qu'en dis-tu, Yumiko ? Nous n'allons pas rester dans la neige à nous fixer dans le blanc des yeux. Autant profiter que l'on soit le matin pour nous occuper de nos petites affaires et nous amuser après.

Je levais la tête en m'arrachant à la longue contemplation du sol, je n'aurais jamais cru que c'était si intéressant à regarder de la neige. M'accompagner pour vendre ? C'est sûr que ça serait toujours mieux que de rester ici en se gelant tout en conservant un silence religieux. Je hochais la tête en souriant. Après tout, c'était pas une si mauvaise idée que ça. En plus s'amuser était une de mes spécialités... enfin personne ne le voyait jamais, mais je le savais et c'était déjà ça.

On y croit...
Boucle-la, fichu lézard.
Tssss, je t'ai déjà dit que j'étais un caméléon. Ne me compare pas à ces stupides créatures.
Tu fais au moins cinq fois la taille d'un caméléon et tu prétends en être un ? Laisse-moi rire...

La voix de Kotchisura me ramena à la réalité, et je le regardais, les yeux un peu perdus dans le vague.

- Nous pouvons aller au marché vendre ton gibier et ensuite, hem... Peut-être aller quelque part où nous pouvons nous réchauffer comme le onsen.

Je mis un temps avant de comprendre ce qu'il disait. Après tout je n'avais jamais été une flèche, pas rapide pour un sous quand on me posait une question, je répondais généralement dix minutes plus tard... Onsen, ça me disait quelque chose au moins. Il me fallut encore un temps avant de faire le rapprochement entre ça et l'eau, et ensuite la vapeur. Conclusion, j'allais aller me détendre aux sources !
Eh ! J'étais fatigué, alors on respectait un peu mon cerveau totalement endormi ! Mais oui j'étais pour ! Cent pour cent d'accord ! Bon faudrait juste éviter de m'endormir dans l'eau pour vivre plus longtemps, mais ça ne poserais pas problème ! Je commençait à m'exciter comme une gamine qui reçoit son premier cadeau.
C'est à ce moment-là que la voix d'Ansatsu retentit en disant qu'il aurait préféré un chocolat chaud.
ça doit à partir de ce moment-là que je me suis dit qu'ils étaient sadiques lui et le chef. Sérieusement, qui pourrait choisir entre un chocolat chaud et un bain chaud !? Choix douloureux et bien trop difficile pour moi.

- Désolé pour mon comportement. Nous y allons ?

Il sourit, et je me mis en marche.

- C'est une très bonne idée, merci de m'accompagner et il n'y a pas de quoi être désolé !

... sauf si on oublie que je suis face à un grand dilemme ! Chocolat... Bain... Que choisir ? Bon de toute façon, ce n'était pas la priorité pour l'instant. C'est pour ça que me mis à sourire et raffermissement ma prise sur mon gibier.